Présidente du conseil d’administration de l’Association des femmes en finance du Québec (AFFQ), elle milite pour une plus grande diversité au sein de cette industrie.
«On a fait de grandes avancées, surtout au cours des dernières années», constate-t-elle.
Les chiffres lui donnent espoir pour la suite. Plusieurs salles de classe des programmes de finances sont majoritairement féminines. Le niveau de scolarité des femmes est à la hausse.
Résultat : les jeunes professionnelles sont de plus en plus nombreuses à investir les différents domaines et métiers de la finance et, surtout, à avoir accès à des postes de gestion. « Ce n’est pas encore la parité dans ces échelons, mais c’est plus accessible qu’avant», résume Mme Benkhouya.
Le Portrait de la diversité du secteur de la finance et de l’assurance au Québec, une étude diffusée en novembre 2023 par Finance Montréal, indique que si les hommes et les femmes sont presque égaux sur le plan de la représentativité dans le marché québécois de la finance, seulement 24 % des cadres supérieurs dans ce secteur sont des femmes.
Or, toutes les portes ne s’ouvrent pas aussi rapidement. «Certains milieux sont plus facilitants et ouverts à la diversité, je dirais», dit Mme Benkhouya en entrevue, pesant chacun de ses mots.
Le milieu de l’assurance est sans doute l’un des plus ouverts à la diversité. À l’opposé, la gestion de portefeuille et de capital de risque demeure très masculine.
Encore des obstacles
Saloua Benkhouya travaille dans l’un de ces domaines traditionnellement masculins. Vice-présidente aux placements privés et investissements d’impact au Fonds de solidarité FTQ, elle est également responsable du portefeuille Services, qui inclut, entre autres, les services financiers et marketing, les technologies et le génie-conseil.

Elle a commencé sa carrière au Moyen-Orient, prenant en charge les marchés mondiaux au sein d’une grande institution financière, pour ensuite revenir à Montréal comme directrice principale en financement structuré et projets d’infrastructure.
«La finance, c’est un monde fascinant, mais aussi très exigeant. Il faut savoir saisir les occasions qui se présentent à nous. Parfois, ça implique de s’expatrier à l’étranger», soutient Mme Benkhouya, qui est aujourd’hui mère de trois jeunes enfants.
Elles quittent leur emploi
Il faut aussi savoir jongler avec la vie familiale. Le rythme de vie effréné en finance a d’ailleurs mené de nombreuses mères à quitter leur emploi ou à refuser un poste de direction, constate-t-elle. Selon l’AFFQ, le phénomène du quitting (« démission ») serait à la hausse chez ces femmes de carrière.
Les activités extraprofessionnelles, telles que les nombreux 5 à 7 de réseautage avec des clients, feraient partie de l’équation.
Comment y arriver alors? «Il faut mettre ses limites et être bien entourée. J’ai la chance d’avoir un conjoint très présent, qui me soutient autant dans mes choix de carrière qu’à la maison», répond celle qui dit n’accepter que deux soirées de réseautage par semaine.
Elle remarque que plusieurs organisations ont fait des progrès en matière de conciliation travail-famille et encouragent même la déconnexion hors des heures de travail, «tant pour les parents que pour tout le personnel».
La pandémie a aussi facilité et démocratisé le travail à la maison, «lorsque nécessaire», nuance-t-elle.
Accompagner les femmes
Il y a encore du travail à faire, soutient Saloua Benkhouya. Inspirée par la Financial Women’s Association of New York, l’Association des femmes en finance du Québec en fait son cheval de bataille.
Fondée en 2002, elle est la seule organisation québécoise entièrement vouée au soutien, à l’accompagnement et au rayonnement des femmes en finance. Son but? Se consacrer à l’avancement professionnel de ses membres en les outillant au mieux.
«Quand je suis revenue à Montréal, je n’avais pas de réseau professionnel. L’AFFQ a été ma bouée.»
UNE COMMUNAUTÉ DYNAMIQUE À QUÉBEC
Les finances ne se brassent pas que dans la métropole. Une communauté de femmes animées par les affaires financières prend de l’ampleur à Québec.
«La finance, ça se passe aussi à Québec», lance Me Sylvie Pigeon, qui codirige le comité de rayonnement régional de l’AFFQ.

Le comité existe depuis la création de l’AFFQ, soit depuis 2002. Bien que peu visible les premières années, il a réellement pris son envol depuis la pandémie. «C’est à ce moment qu’on a vu rejaillir les iniquités, mais surtout qu’on a senti le besoin de réseauter à nouveau.»
Comme plusieurs de ses collègues, Sylvie Pigeon a navigué dans un milieu majoritairement masculin. «Au départ, on était une poignée de femmes», se souvient l’avocate spécialisée en affaires mobilières et financières.
À Québec, elles se connaissent presque toutes. «On est une cinquantaine de membres actives. C’est un milieu tissé serré, mais toujours accueillant», insiste-t-elle. Il s’agit de professionnelles évoluant au sein d’institutions financières, de cabinets comptables ou juridiques, de grandes entreprises, ou agissant comme consultantes, ainsi que de jeunes professionnelles ambitieuses souhaitant s’investir dans leur carrière.
Une dizaine de jeunes femmes ont récemment joint l’association. «Le mentorat et les conseils spontanés, ça fait aussi partie de l’accompagnement.»
Le comité de la ville de Québec organise ses propres événements, en plus de participer à ceux de l’organisation provinciale.
Ce texte fait partie du magazine Le Soleil Affaires, aussi disponible en version électronique intégrale.