Standard & Poor’s (S&P). Photo DR
Le 14 juillet, l’agence Standard & Poor’s a abaissé la note souveraine du Sénégal, la faisant passer de B à B-, tout en maintenant une perspective négative. Une dégradation qui sonne comme un avertissement en pleine phase de restructuration budgétaire. L’agence justifie sa décision par la détérioration rapide des finances publiques, soulignant un niveau d’endettement plus préoccupant que prévu, avec un déficit estimé à 9 % du PIB, contre les 7,8 % initialement annoncés. Ce diagnostic intervient dans un contexte où le pays tente de rassurer les bailleurs internationaux, alors que les marges de manœuvre budgétaires s’amenuisent.
Cette décision s’inscrit dans une séquence difficile pour les autorités, déjà confrontées à des tensions de trésorerie internes et à une faible mobilisation fiscale. Pour les marchés, la note B- reste certes dans la catégorie des obligations à haut risque, mais sa dégradation réduit davantage les chances d’un financement à des conditions favorables. Elle agit aussi comme un baromètre auprès d’autres institutions internationales, qui fondent souvent leurs anticipations sur ces notations.
La réponse gouvernementale entre prudence et pédagogie
Quelques heures après l’annonce de l’agence américaine, le ministère des Finances a publié une réaction officielle. Sans contester le jugement de fond, l’État indique qu’il en prend acte et l’intègre à sa stratégie de redressement. Le gouvernement met en avant la transparence de sa nouvelle approche budgétaire, mentionnant la mission confiée à un cabinet international indépendant pour fiabiliser l’état réel des finances. L’objectif est de rompre avec les pratiques opaques du passé et de restaurer la confiance sur la base de données consolidées et vérifiables.
Dans cette dynamique, une opération de rebasage du PIB est également annoncée. Cette révision, qui consiste à recalculer la richesse nationale en tenant compte de secteurs économiques insuffisamment intégrés aux précédents calculs, pourrait mécaniquement améliorer les indicateurs d’endettement. Le gouvernement espère ainsi atténuer la pression des marchés, en affichant une capacité à stabiliser ses fondamentaux tout en poursuivant ses négociations avec le FMI.
Cette posture vise à rassurer sans nier les difficultés. Elle s’adresse à la fois aux agences de notation, aux bailleurs bilatéraux et à une opinion nationale de plus en plus attentive aux signaux envoyés par les partenaires étrangers. Car au-delà de la note, c’est la perception de la solidité de l’État sénégalais qui est en jeu.
L’enjeu de la confiance à reconstruire
Cette rétrogradation tombe à un moment où les priorités politiques et économiques du Sénégal sont engagées dans une nouvelle trajectoire. Entre promesses de rupture, lutte contre les dettes cachées et volonté de redresser les comptes, l’exécutif marche sur un fil. La baisse de la note accentue la pression sur la stratégie de financement à moyen terme et rend encore plus nécessaire l’activation d’instruments alternatifs : emprunts concessionnels, appuis budgétaires multilatéraux ou partenariats structurants.
Mais la confiance, elle, ne se décrète pas. Elle se reconquiert. À travers des actes, une cohérence, et des résultats tangibles. La promesse de transparence devra donc se traduire rapidement par une meilleure lisibilité de la gestion des ressources, un encadrement strict de la dépense publique, et des efforts clairs pour réduire les déficits.
Le signal envoyé par S&P n’est pas une sentence définitive. Il est une alerte sérieuse. Et la réponse du gouvernement, si elle est suivie de faits concrets, pourrait transformer cet épisode en opportunité : celle de montrer que le Sénégal a la capacité non seulement de reconnaître ses fragilités, mais aussi de les corriger avec méthode et responsabilité.