«Autour de la ligne de flottaison»
On n’obtiendra pas la même précision sur le bénéfice, si ce n’est qu’il se situe «autour de la ligne de flottaison». La raison: «nous sommes toujours en phase d’investissement en Suisse», précise le représentant de la 5e génération de la famille Oddo, à la tête d’un groupe d’environ 3000 collaborateurs et 140 milliards d’euros d’encours clients, actif dans la banque privée, la gestion d’actifs et la banque d’investissement. Oddo BHF Suisse n’a pas encore publié ses résultats 2024, les banques helvétiques ont jusqu’à fin avril pour le faire.
D’importants changements ont eu lieu au sein de l’ex-Landolt depuis 2021: l’informatique a été changée, le back-office réorganisé, tant que la direction a été renouvelée et les équipes passablement modifiées.
Le registre du commerce montre une importante rotation du personnel côté romand, ce qui signifie habituellement qu’une banque a fait des économies ou un tri dans sa clientèle. Landolt a visé les deux, selon nos informations. «Nous avons eu besoin de “re-staffer”», explique Philippe Oddo. L’antenne romande compte actuellement environ 60 postes de travail, contre 70 au moment du rachat, et 90 du côté zurichois, où se trouvent l’informatique et le back-office qui servent toute la banque.
Proposer l’offre du groupe
Mais le nombre de gérants est identique des deux côtés de la Sarine, précise notre interlocuteur, soulignant que d’anciens employés de Landolt étaient plutôt «ancienne méthode». C’est-à-dire des gérants avec des liens proches avec leurs clients et que dans ce cas, les premiers ont «souvent tendance à ne vendre que ce qu’ils connaissent bien». Or la priorité est dorénavant d’offrir toutes les expertises du groupe aux clients suisses, en particulier aux entrepreneurs.
Cela signifie des services de banque d’investissement, comme du conseil en fusion-acquisition, de l’accompagnement vers une introduction en Bourse ou encore organiser de la dette privée (mais ODDO-BHF ne finance pas les entreprises). Avec l’objectif final que ces entrepreneurs deviennent clients de la gestion de fortune. Cette offre distingue la banque suisse par rapport à la majorité de ses concurrents domestiques, généralement peu enclins à sortir de leur spécialisation en gestion privée.
Outre le lancement d’une offre de gestion de fortune pour les femmes, la stratégie d’ODDO-BHF Suisse consiste aussi à «apporter le tissu industriel suisse à l’attention des investisseurs étrangers», c’est-à-dire leur faire découvrir les grandes PME helvétiques, cotées ou non, qui font la spécificité de l’économie helvétique, en plus des multinationales. C’est la mission d’une dizaine d’analystes et autres spécialistes basés en Suisse. «Notre entité suisse ne se résume pas à une force de vente pour les services du groupe, nous avons et nous développons une véritable expertise localement», appuie Philippe Oddo.
«Le qui avant le quoi»
Aujourd’hui, le comité de direction d’ODDO-BHF Suisse est composé de 6 Alémaniques et 2 Romands. Le signe que la partie germanophone est dominante dans la banque, d’autant plus que la marque Landolt a disparu? Notre interlocuteur répond par une formule: «le qui avant le quoi», qui signifie que trouver les bonnes personnes est ce qui compte avant tout.
On lui demande aussi si la stratégie du pôle zurichois – viser le marché allemand – pourrait être répliquée depuis Genève avec le marché français. Difficile, selon lui: «les banques suisses ont accès au marché allemand, mais pas au marché français, il faut que des clients potentiels sollicitent la banque suisse», ce qu’on appelle une «reverse sollicitation» en jargon financier. Le pôle romand de la banque cible plutôt les Français et autres étrangers en Suisse ou les clientèles européennes qui pourraient être intéressées par la Suisse.