Qui sont les finfluenceurs ? Y a-t-il de bons finfluenceurs et de mauvais finfluenceurs ? Pourquoi cet engouement pour les placements financiers ? Faut-il se féliciter de l’émergence de ces jeunes qui parlent économie ? Quels sont les risques ? Comment réguler cette activité ?
Pour nous répondre, Anne-Claire Bennevault, experte de l’innovation financière et du numérique. Elle a fondé le cabinet de conseil BNVLT, dédié aux marques historiques et aux start-up du secteur financier. Dans ce cadre, elle a aussi créé la plateforme SPAK, qui développe des programmes de sensibilisation et des contenus pédagogiques pour favoriser une meilleure éducation financière. Pour elle, l’émergence de ces finfluenceurs, “c’est quand même une bonne nouvelle parce que ça veut dire que pas mal de gens se sont approprié les réseaux sociaux pour parler de ce sujet assez tabou, même en famille. La moins bonne nouvelle, c’est qu’il y a pas mal d’amateurisme et aussi des arnaques qui traînent sur les réseaux sociaux, donc il faut faire attention”.
D’où viennent les finfluenceurs ?
C’est à la fin des années 2010 que le terme a commencé à émerger, d’abord aux États-Unis, quand les créateurs de contenus ont commencé à s’intéresser à l’économie. Là-bas, on les appelle les “finfluencers”, contraction de finance et d’influenceur. Certains, en France, ajoutent un “in”, donnant finINfluenceurs. Mais comme aux États-Unis d’Amérique, les Français se sont rapidement mis aux sujets financiers.
Miracle des Internets, grâce à ces finfluenceurs, l’économie est devenue un sujet cool et intéressant. Terminé le conseiller bancaire austère, place à des jeunes en jean et t-shirt et des vidéos postées sur TikTok, YouTube ou Instagram pour vous expliquer comment investir en bourse ou épargner.
La crise sanitaire de 2020 va servir de coup d’accélérateur à ces influenceurs d’un nouveau genre : l’économie mondiale vacille, les jeunes veulent prendre le contrôle de leur argent, tout le monde parle de crypto-monnaie sans rien y comprendre. Une voie royale pour les finfluenceurs ! Anne-Claire Bennevault précise : “Ce qui s’est passé, c’est qu’on avait tous beaucoup de temps devant nos ordinateurs et de l’épargne disponible à ce moment-là. Donc pas mal de plateformes de cryptos et de ce qu’on appelle des néo-brokers ou des courtiers en ligne sont venus communiquer assez massivement sur Internet et sur les réseaux sociaux pour attirer des nouveaux investisseurs.”
Certains finfluenceurs sont dangereux
L’émergence des finfluenceurs ne va pas se faire sans dégât, pour la bonne et simple raison que ces conseillers bancaires 2.0 sont souvent des autodidactes et parfois des gens qui n’y connaissent absolument rien à la finance. C’est comme ça qu’on va se retrouver avec des gens qui perdent toutes leurs économies à cause d’une vidéo YouTube.
D’ailleurs, ici en France, l’Autorité des marchés financiers, l’AMF va elle-même alerter sur ces risques : elle s’est dite “préoccupée” par l’accroissement du nombre de ces créateurs de contenus qui vantent des placements à haut risque, sans aucune formation, et surtout sans aucune transparence sur leurs partenariats publicitaires avec certaines boîtes dont ils vantent les produits.
Anne-Claire Bennevault : “Les grosses ficelles, ce sont les placements avec rendement garanti, avec des taux absolument dingues. Ça, ça n’existe pas, il faut fuir absolument. Tous ceux qui vous proposent aussi de rentrer en contact direct, ‘direct message’, et avec des formations payantes, des choses un peu exotiques comme ça, méfiez-vous. Et puis dans le lot des arnaques, on voit aussi énormément émerger d’arnaques aux faux conseillers. Ce sont carrément des conseillers qui vont vous appeler, se faisant passer pour votre conseiller bancaire.”
Elle explique aussi que les jeunes, les non-initiés, et les moins fortunés sont la cible : “35% des 18-24 ans ont déjà subi une arnaque financière.”
Qui sont les finfluenceurs honnêtes ?
Anne-Claire Bennevault décrit les plus honnêtes : “Ils vont vous dire clairement s’ils sont sponsorisés ou pas par une marque financière. Ils doivent vous rappeler aussi les bonnes pratiques, donc être prudent dans vos investissements, mettre en place une épargne de précaution […]. Et puis aussi rappeler que les performances passées ne préjugent pas des performances à venir, parce que ça, c’est très important aussi de le dire.”
Elle ajoute quelques précautions à prendre : “Il y a beaucoup de monde sur le sujet, ce qu’il faut regarder, ce sont ceux qui ont l’autorisation d’exercer quelque part, de donner des conseils en matière de finances. Donc, pour ça, vous avez des diplômes ou des accréditations, et notamment un conseiller en investissement financier, c’est quelqu’un qui a passé des examens et qui a le droit de donner des conseils. Donc déjà, vous pouvez vérifier si l’influenceur dispose de cette autorisation et de cette compétence. Il y a aussi une zone de flou, parce que dans les influenceurs financiers, il y a des gens qui ne disposent pas de ça, mais qui sont pour autant sérieux et éthiques dans ce qu’ils proposent.”
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