En 2021, le sénateur Ted Cruz voyait dans le Texas « le centre de l’univers du Bitcoin et de la crypto ». Trois ans plus tard, le gouverneur Greg Abbott affirmait fièrement que l’État portait « la couronne mondiale du minage de Bitcoin ». Mais pour les habitants de petites villes comme Granbury, situées à une heure de Fort Worth, la réalité est bien plus sombre.
À Granbury, la mine de 300 mégawatts exploitée par Marathon Digital, une entreprise floridienne spécialisée dans les cryptomonnaies, utilise un mélange d’immersion liquide et de ventilateurs industriels pour empêcher ses 20 000 ordinateurs de surchauffer. Résultat : un bruit incessant, décrit par les habitants comme « insupportable », envahit désormais leur quotidien.
Un vacarme aux conséquences dramatiques
Pour Danny Lakey, Karen Pearson, Nick et Virginia Browning, tous riverains de la mine, ce vacarme est bien plus qu’une nuisance sonore. « Imaginez un aspirateur de 83 dB fonctionnant jour et nuit, directement sur votre terrasse », explique Nick Browning. « Qui pourrait vivre ainsi ? » Résultat : troubles du sommeil, crises cardiaques, migraines chroniques, et même des complications neurologiques pour certains.
Le lien entre pollution sonore et santé n’est plus à prouver. De nombreuses études scientifiques, dont celles publiées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), montrent que l’exposition prolongée au bruit augmente les risques de maladies cardiovasculaires.
Les autorités locales aux abonnés absents
Malgré les plaintes répétées, Marathon Digital se retranche derrière le respect des normes locales de bruit et affirme avoir investi des millions pour réduire l’impact sonore. Pourtant, les habitants de Granbury dénoncent un mépris flagrant de leurs conditions de vie.
Le plus révoltant, selon eux, est l’absence de protection : « Nous avons été laissés seuls face à une multinationale. Pas de soutien de la ville, pas de protection de l’État, » s’insurge Karen Pearson. « Granbury refuse d’intervenir sous prétexte que nous ne sommes pas dans ses limites administratives. » Résultat : une véritable zone de sacrifice environnemental s’est créée.
Un combat qui s’organise malgré tout
Face à cette situation intenable, les riverains ne baissent pas les bras. Sous la bannière de l’association Protect Hood County, ils se battent sur plusieurs fronts : actions en justice, mobilisation médiatique et tentatives de stopper l’extension des infrastructures énergétiques liées à la mine.
Un premier succès a été obtenu : le blocage temporaire d’un permis de construire pour une troisième centrale à gaz, un projet qui aggraverait encore la pollution de l’air et de l’eau. Mais les défis restent colossaux : « Nous avons besoin de réglementations plus strictes pour encadrer ce type d’activités et protéger nos communautés », martèle Danny Lakey.
Un enjeu bien plus vaste que Granbury
La situation de Granbury préfigure celle d’autres régions rurales américaines. Avec le développement exponentiel de l’intelligence artificielle et des data centers, la demande énergétique explose, attirant les industries dans des zones sans réglementations strictes.
« Aujourd’hui c’est le Bitcoin, demain ce seront les serveurs d’IA, » prévient Karen Pearson. « Si nous ne réagissons pas, ce modèle de développement sauvage va se multiplier. »

